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Delphine Delafon

Créatrice franco-américaine et Parisienne dans l’âme, Delphine Delafon grandit sous l’influence des artistes qui l’entourent. Passionnée par le travail du cuir et de la matière, elle crée sa marque éponyme en 2010. Précurseuse, elle ouvre un atelier de fabrication dans le centre de Paris et propose à ses clientes, en plus de ses modèles phares comme le réputé sac seau à œillets, des créations sur-mesure au gré de leurs envies. Électron libre et passionnée, elle n’a de cesse de naviguer entre ses amis créateurs et ses propres projets. C’est ainsi qu’elle renoue avec ses sacs iconiques en 2021. Aujourd'hui Delphine Delafon va plus loin dans son envie de ralentir la production de produits neufs et nous confie ses archives à prix doux ainsi que quelques sacs iconiques en offre découverte.

  • 100%
    DES SACS SONT FABRIQUÉS AVEC DES MATERIAUX REJETÉS PAR L’INDUSTRIE DU LUXE
  • 100%
    DES FOURNISSEURS SONT PARISIENS
  • 2012
    DELPHINE DÉCIDE DE GARDER LA FABRICATION EN INTERNE POUR NE PAS "INDUSTRIALISER" LA PRODUCTION

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https://delphinedelafon.com/

"J’ai souvent été approchée par des gens qui m’encourageaient a privilégier le profit plutôt que les valeurs et je n’arrivais jamais à accepter cette manière de travailler"

Est-ce que tu peux nous présenter Delphine Delafon avec tes mots ?

DELPHINE : C’est une marque qui porte mon nom mais aussi mes valeurs. Je n’y ai jamais travaillé en tant qu’argument marketing mais les choses se sont toujours faites toutes seules au fur et à mesure que je refusais de faire des concessions. J’ai souvent été approchée par des gens qui m’encourageaient à privilégier le profit plutôt que les valeurs et je n’arrivais jamais à accepter cette manière de travailler. Ça n'a jamais été non plus inscrit dans une radicalité de mon côté mais plutôt comme une volonté naturelle de suivre mes envies et de garder la façon que j’aime de travailler comme ADN et comme valeur première. Ce que j’aime par-dessus tout c’est le travail manuel, c’est ainsi que tous les sacs qui sortent de chez moi sont différents, uniques mais pour autant accessibles et fabriqués chez moi.

Quel est ton parcours, qu’est qui t’a amenée à lancer ce projet ?

Delphine : Je viens de l’univers du vêtement au départ et je pense que ça se ressent dans mes sacs et dans la façon dont ils sont faits. Ils n’ont rien d’académique dans la façon dont ils sont faits ou pensés. C’est ce qui les rend un peu différent j’espère.
A l'époque ou je faisais des vêtements c’était toujours le cuir qui m’attirait, les matières, les textures, les métalleries. Je faisais des robes mixées cuir/tissu, parfois avec des pièces en métal dessus.
Pour DD, je n’ai jamais songé à “lancer” quoi que ce soit, se sont mes premières clientes qui ont véritablement initié le démarrage de la marque et adhéré à ce que je proposais.
En 2017, après 8 années j’avais décidé de mettre en pause ma société qui grossissait trop vite (et mal) parce que je n’arrivais plus à suivre ni moralement ni financièrement. A ce moment-là j’ai perdu mon nom. Je suis devenue consultante pour des marques émergentes (Marcia, Martin Martin, Cordiz, Becane et d’autres). J’aide au développement des collections sur tous les aspects que cela inclut (production, prix, fournisseurs, design et parfois stratégique).
Je crée aussi régulièrement des modèles pour des marques “amies” (Gas Bijoux, Ba&sh, Françoise et d’autres).
Je fonctionne principalement à l’instinct, ce qui m’a souvent joué des tours, mais le résultat est gratifiant en bout de course car ça fait 20 ans que je fais ce que j’aime.
Aujourd’hui j’ai récupéré l’usage de mon nom grâce à une avocate que je ne connaissais pas et qui m’a passé un jour un coup de fil (j’ai une pensée pour elle chaque jour ;) ).
J’ai donc repris mon activité de designer en mon nom et à nouveau je travaille de façon totalement artisanale.
Je me sens plus proche d’un peintre que d’un designer qui travaille dans une industrie par exemple.

Quel est ta pièce fétiche Delphine Delafon ?

DELPHINE : Trop difficile, ça change tout le temps.
J’ai cependant une passion pour les pièces métalliques (chaînes, boucles, œillets, etc) qui reviennent toujours.
J’avais aussi sorti une capsule de vêtements en cuir pour Delphine Delafon en 2017 et j’ai énormément de “fétiche” dans cette collection - un pantalon patte d’eph en agneau rouge ou des bottes à lacets avec un talon en bois.
En ce moment, si je dois choisir un sac, ça serait le Honey Bunny dans sa version rose fluo, le « Honey Love ».

Quel est ton processus créatif ? Qu’est ce qui t’inspire ?

DELPHINE : Ce qui m’inspire c’est un mix entre les matières, les textures et les couleurs, l’ancien ou le côté vintage (qui a une histoire). Mais ça peut être juste une peau d’une certaine couleur croisée chez un fournisseur ou un combo de couleur vu sur une image. J’ai un faible pour les choses à l’aspect vintage car j’ai grandi dans “l’ancien”.
Pour ce qui est d’un éventuel processus, je fonctionne par listes.
J’en accroche au-dessus de mon bureau, sur mon frigo, dans des agendas ou des cahiers. J’y ecrits les sacs que je prévois de faire ou les compositions matières (“grainé rose, mix velours gris/cuir noir, etc). C’est sans doute étrange quand on fait un métier artistique de ne pas le faire avec des images mais plutôt avec des mots, mais j’ai assez d’image dans la tête et j’ai besoin de les ordonner en écrivant.

Quels sont tes premiers souvenirs de vêtements ?

Delphine : Comme beaucoup de petites filles, ma mère et ma grand-mère. Des photos. Je viens d’une famille de femmes, un véritable matriarcat. J’ai donc beaucoup de photos de ma grand-mère, arrière-grand-mère mais aussi de ma mère et ses sœurs dans les années 70. Elles avaient toutes du style.

Quelles sont tes icônes de style ?

Delphine : Chloé Sevigny, Laure Adler, le style pour moi ça n’est pas de mettre telle jupe avec telles chaussures, c’est une intelligence, des idées, une singularité. Une personnalité insolite, ça, ça a du style.
Patti Smith, Simone Veil, Niki de Saint Phalle, Nina Simone. Je suis super fan de Tina Turner, Simone Signoret et Marilyn !

Comment t’inspires-tu du vintage pour créer tes collections ?

Delphine : Je n’ai pas de processus défini, c’est au petit bonheur la chance, je suis d’ailleurs toujours fascinée par les créateurs qui arrivent à décrire leur processus créatif.
Je trouve que lorsqu‘on est créatif ça vous arrive tout le temps à n’importe quel moment. Ce serait si commode si on pouvait choisir ses moments et son “process”.
Pour le vintage ça peut partir de n’importe quoi qui vous tape dans l’œil, une boucle, un motif ou une combinaison de couleur.

Que penses-tu de l’impact carbone de la mode aujourd’hui ?

DELPHINE :Je pense que le « greenwashing » est sûr présent dans la mode. Et pour cause, c’est dans le top des industries les plus polluantes. Tout le monde essaie de se justifier à coup d’arguments marketing bidons mais en réalité si on est vraiment inquiet du sort de la planète le mieux est de faire un autre métier. Je parle des marques qui pratiquent la mode à échelle industrielle - luxe inclus. Qui se targuent de faire du cuir vegan par exemple alors que ça consomme des millions de litres d’eau et que finalement ce cuir, autant que le sac fait avec, sera envoyé en transport express par avion en 2 jours au bout du monde. En ce qui concerne les petits créateurs, pour la plupart, l’impact est moins important c’est sûr. Mais globalement je suis fatiguée des discours “green” des marques.

En ce qui me concerne, j’arrive à peu près à vivre avec ma conscience, je produis à la demande, je produis à Paris et j’y achète mes cuirs.

Mais les décideurs et les gens de pouvoir, eux, n’engagent aucune réforme dans le sens de l’écologie. Ce sont les petits qui doivent porter chacun à leur échelle des responsabilités alors qu’en comparaison leur impact est infime. Chacun sait que rien ne changera comme ça. En culpabilisant le petit qui fait ce qu’il peut et en laissant les « gros » faire ce qu’ils veulent pour raison économique. Loin de moi l’idée de faire de grands discours mais je pense me comporter de manière pas trop moche dans un monde en crise, je prends peu l’avion, je me déplace à vélo, je trie mes déchets, je travaille localement.

Malheureusement on aura tous beau faire ça jusqu’à la fin de nos jours, si les industriels, les gouvernements et les grandes entreprises ne changent pas, rien ne bougera.

C’est assez désolant et pour autant j’ai plutôt confiance dans les jeunes générations qui ont grandi avec ces problèmes contrairement aux vieux qui nous gouvernent.

Quelles sont les valeurs de ta marque ? Qu’est-ce que ces pièces racontent et offrent aux femmes qui les portent ?

DELPHINE : J’aimerais que les valeurs de ma marque racontent une idée plus moderne du « luxe ». Qui essaie de s’éloigner du sac monogrammé très cher et qui se situe plutôt dans la façon qu’on a de pouvoir choisir. Savoir où et par qui il est fait, tout ça à un prix abordable. Être plus dans les fondamentaux et quelque chose de plus humain.

Comment et où produisez-vous ?

DELPHINE : Paris, Paris, Paris. Dans mon atelier - depuis toujours.
Ça fait plus de 15 ans que je travaille comme ça, bien avant que ce soit à la mode ou un argument marketing pour les marques.
Je travaille ainsi parce que c’est comme ça que j’aime le faire et c’est comme ça que j’y vois du sens.

Une marque écologique ou une initiative qui t’inspire pour Delphine Delafon ?

DELPHINE : Je trouve que les nouvelles générations de créateurs ont des réflexions plus durables, c’est tout de même rassurant.
J’ai aimé quand Marine Serre a recyclé des foulards pour ses vêtements, je sais également qu’elle produit localement.
Disons que sans « m’inspirer » certaines initiatives m’enlèvent parfois un peu de mes inquiétudes et allume une mini lueur d’espoir.

"Je fonctionne principalement à l’instinct, ce qui m’a souvent joué des tours, mais le résultat est gratifiant en bout de course car ça fait 20 ans que je fais ce que j’aime"

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